« L’homme qui parle tient un double discours: un discours manifeste, par lequel il pense s’adresser à son semblable afin de lui faire part d’un certain nombre d’informations – c’est le discours intentionnel, promu aujourd’hui sous le titre de communication, au rang de remède universel, au malaise dans la modernité; et un discours autre, qui parle plus du sujet que celui-ci n’en dit; et qui se donne à entendre dans les lacunes et les ratages du premier – c’est le discours inconscient où il n’est question que de la vérité du désir. Tel est le sens de l’inconscient freudien. »
Jean – Pierre Dreyfuss, Jean – Marie Jadin
La psychanalyse est un champ dynamique englobant à la fois méthode
d’investigation, dispositif thérapeutique et tissu théorique
sans cesse en mouvement. Bien que Sigmund Freud en ait été le
défricheur, soucieux de comprendre, d’expliquer et de proposer
aux souffrances psychiques de son temps, ses thèses et ses
questions ne cessent d’étre reprises et approfondies. De nombreuses
figures intellectuelles nées des domaines de la psychologie,
de la biologie, de la psychiatrie mais aussi de la philosophie et
des arts ont contribuées a l’enrichissement de ce materiel source.
A l’évocation du nom «psychanalyse», l’image mentale mobilisée
aurait ces contours: un patient, en proie à un mal—étre, recherchant
soulagement, comprehension à son affliction et piste de devenir
en un lieu d’écoute totale. L’analyste, consulté à intervalles
réguliers, doté d’un regard et d’une écoute singulière introduira
par ses gestes et ses actes d‘interprétation au coeur de la parole de
l’analysant le souffle et l’espace nécessaire à l’élan désirant.
Si Ia psychanalyse est exigeante en ce qu’elle repose sur un ordre
théorique, elle n’a pas pour autant de visée normative. Son objet a
bien quelque chose à voir avec le désir et la liberté. La règle de
l’association libre posée du côté du patient en est la garante. L’ana- ‘
lyste porte son oreille et son regard sur la ligne d’horizon de la
conscience et du discours manifeste, toute entière soutenue par le
postulat central de l’existence d‘un déterminisme inconscient. Par
liberté, on entend une double motion: à la fois conquête et dégagement
de soi.
Etre en analyse, c’est conférer une valeur à toute production de
soi, c’est porter son regard sur les produits de l’ombre, c’est prendre
appui sur l’idée d’une vie psychique dont le mouvement s’articule
serré autour d’un désir inconscient aussi impalpable qu’efficient
et qui donne à voir et à entendre les signes de son existence,
en appelant par ces voies à l’interprétation.
La psychanalyse, nommée très justement « cure par la parole » par
une des très spirituelles patientes de Freud, agit par le ressort créateur
de la parole elle-même réceptionnée originalement par l’analyste. Le tracé
subjectif prend forme grâce aux multiples sauts, ruptures, énigmes et
déchirures du discours du patient qui sont autant de promesses de relance
de vie.
Texte donné par Paola DESFOURNEAUX